Importation de viande : la France prend les devants
« Finies les importations de viandes issues d’animaux élevés à l’étranger aux antibiotiques de croissance ! », s’est réjoui le ministre de l’Agriculture. Un arrêté publié le 22 février dernier interdit d'importer, d'introduire et de mettre sur le marché français des viandes et produits à base de viande issus d'animaux ayant reçu des antimicrobiens pour favoriser leur croissance ou augmenter le rendement. L’interdiction s’applique à compter du 22 avril 2022 et pour une durée d’un an.
Cet arrêté s’inscrit dans le prolongement de la loi n°2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (dite EGalim 1). Cette loi a ajouté un article L. 236-1 A au code rural et de la pêche maritime ainsi rédigé : il est interdit de proposer à la vente ou de distribuer à titre gratuit en vue de la consommation humaine ou animale des denrées alimentaires ou produits agricoles pour lesquels il a été fait usage de produits phytopharmaceutiques ou vétérinaires ou d'aliments pour animaux non autorisés par la réglementation européenne ou ne respectant pas les exigences d'identification et de traçabilité imposées par cette même réglementation.
Une avancée vers la réciprocité des normes dans les échanges commerciaux
De son côté l’Europe a exclu, depuis 2006, la pratique des antibiotiques à des fins de croissance dans les élevages européens. Puis, l’article 118 et par renvoi l’article 107 du règlement (UE) 2019/6 du 11 décembre 2018 relatif aux médicaments vétérinaires ont proscrit les produits importés dans l’UE provenant d’animaux ayant été traités avec des antibiotiques facteurs de croissance. Il était prévu une entrée en vigueur avant le 28 janvier 2022, mais faute d’acte délégué établissant clairement les modalités du contrôle sanitaire aux frontières de l’Union européenne, la mesure est toujours en attente d’application. Le Gouvernement a donc décidé de prendre les devants à l’échelle nationale laissant aux opérateurs jusqu’au 22 avril 2022 pour s’adapter.
Concrètement, tout au long de la chaîne d’importation, de transformation et de mise en marché, les opérateurs français seront tenus de collecter les informations sur la provenance des animaux dont sont issus les viandes et produits à base de viande acquis. Ils seront également tenus de mettre en œuvre « des moyens de maitrise du risque d’incorporation de ces viandes et produits à base de viandes ne respectant pas cette interdiction. Il s’agit en particulier de recueillir auprès des fournisseurs des attestations de conformité pour les produits importés de pays tiers de l’Union européenne n’ayant pas interdit les antibiotiques utilisés en tant que facteurs de croissance », précise le ministère de l’Agriculture. L’application de cette mesure s’avère plus complexe qu’il n’y parait, elle aura au moins le mérite de restreindre l’entrée des viandes « dopées » sur le territoire.
Le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, compte bien avancer sur ce dossier dans le cadre de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne pour que cette interdiction s’applique enfin à l’échelle européenne. Dernièrement, lors du Conseil européen de l’Agriculture du mois de février, les ministres ont souligné « la nécessité de mieux articuler les normes de production sanitaires et environnementales imposées dans l’UE et celles appliquées aux produits agro-alimentaires importés, dans le plein respect du cadre réglementaire de l’OMC et en relations avec nos partenaires commerciaux, notamment par un réexamen de limites maximales de résidus des produits phytopharmaceutiques, et la mise en place de mesures-miroir dans le droit de l’Union européenne ». La réciprocité des normes appliquée aux produits importés est indispensable pour protéger l’agriculture européenne.