La certification HVE serait contraire au droit européen
Dans le cadre de la future PAC 2023-2027, la certification Haute Valeur Environnementale (HVE) permettrait d’accéder au niveau supérieur de l’éco-régime, (le nouveau paiement vert) établi par l’article 31 du règlement (UE) 2021/2115 relatif aux plans stratégiques. Ce choix du ministère de l’Agriculture, intégré dans le PSN français (Plan stratégique National) anime les débats depuis plusieurs mois car il place sur un pied d’égalité le label bio et la certification HVE.
Pas de plus-value environnementale suffisante
Le niveau 3 de la certification environnemental qualifié de « Haute Valeur Environnementale », est fondé sur des indicateurs de résultats relatifs à la biodiversité, la stratégie phytosanitaire, la gestion de la fertilisation et de l’irrigation. Cependant, pour les défenseurs de l’agriculture biologique, le compte n’y est pas ! « Les indicateurs choisis et les méthodes appliquées ne permettent pas de satisfaire aux exigences environnementales que cette certification est censée satisfaire ». Ce constat avait déjà été relayé, début 2021 par l’Office français de la biodiversité (OFB), établissement public de l’Etat placé sous la double tutelle du ministère de la Transition écologique et du ministère de l’Agriculture qui appelait à une révision profonde des critères d’éligibilité. La même année la Cour des comptes avait également affirmé que la HVE « envisagée comme moyen d’accès au niveau supérieur d’éco-régime dans le projet de PSN, n’apporte pas de garantie environnementale suffisante à l’heure actuelle. La révision des exigences et des voies d’accès à ce label est donc un préalable indispensable pour y adosser le paiement de l’éco-régime ».
Par ailleurs, la position du Gouvernement a vertement été critiquée, en mars dernier, par la Commission européenne qui demandait à la France « de tenir compte du niveau de sa contribution aux objectifs environnementaux par rapport à l’agriculture biologique et si nécessaire de différencier les niveaux de rémunération ». La Commission notait « avec préoccupation que la rémunération de niveau supérieur pour service environnemental dans l’éco-régime est la même pour l’agriculture biologique et la certification HVE alors que le cahier des charges de cette dernière est beaucoup moins contraignant ». Elle ajoutait prendre note de la révision en cours de la certification HVE, mais demandait à la France « soit de reporter l’inclusion des options d’accès à l’éco-régime par les certifications CE2+ et HVE à l’occasion d’une prochaine révision du PSN soit de suspendre ces options dans le Plan jusqu’à la mise en place du nouveau cahier de charges ».
Une entorse au règlement PSN
Avec cette étude, la FNAB porte la contestation sur le plan juridique en dénonçant plusieurs manquements au droit européen. En choisissant d’inclure la HVE dans la liste des pratiques agricoles bénéfiques pour l’environnement, la France ne répondrait pas aux objectifs fixés par le règlement PSN (règlement UE 2021/2115). De facto, toujours selon les auteurs de la note, si la Commission venait à approuver un plan stratégique national qui ne respecterait pas les dispositions de règlement PSN, sa décision serait entachée d’une invalidité.
Au-delà, la certification HVE serait incompatible avec le droit général de l’Union à plusieurs égards. L’étude évoque notamment une violation du principe d’égalité de traitement se fondant sur l’article 20 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Ainsi, « le défaut de pertinence du cahier des charges de la HVE au regard des exigences environnementales conduit à établir une différence de traitement entre les exploitations bénéficiant de la HVE et celles relevant de l’agriculture biologique. Ces dernières sont tenues en effet de satisfaire des indicateurs autrement plus exigeants que ceux de la HVE pour bénéficier du même régime », argumentent les rédacteurs de la note.
Les négociations entrent dans leur dernière ligne droite. Dans un communiqué en date du 23 juin 2022, la FNAB demande une valorisation de l’agriculture biologique et une différenciation avec la HVE. Le chiffre de 145 euros par hectare et par an sur l’éco-régime est avancé. « Nous sommes confiants, nous avons la science et les chiffres pour nous, si nous devons nous lancer dans une bataille juridique pour faire reconnaître ce que nous valons vraiment nous le ferons » concluait Philippe Camburet, président de la FNAB.