Dispense de TVA sur la vente d’un immeuble et déduction sur les frais afférents à l’opération
En vertu de l’article 257 bis du CGI, les livraisons de biens réalisés entre redevables de la TVA sont dispensées de celle-ci en cas de transmission (à titre onéreux ou gratuit) d’une universalité totale ou partielle de biens. Ce dispositif est possible car le bénéficiaire de la transmission est réputé continuer la personne du cédant.
Notons que la loi de finances pour 2023 a modifié la rédaction de l’article 257 bis du CGI, mais cette modification est sans incidence, son objet était seulement de se mettre en conformité avec la rédaction du droit européen.
Par ailleurs, l’article 271 du CGI précise que « la TVA qui a grevé les éléments du prix d’une opération imposable est déductible de la TVA applicable à cette opération. »
La directive européenne de TVA précise également que l’existence d’un lien direct et immédiat entre une opération en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction est nécessaire pour que la TVA puisse être déduite par l’assujetti et pour pouvoir déterminer l’étendue de ce droit.
En effet, il est nécessaire que le droit à déduire la TVA implique que les dépenses nécessaires à l’acquisition en amont fassent partie des éléments constitutifs du prix des opérations taxées en aval ouvrant droit à déduction.
Néanmoins en l’absence de ce lien, l’assujetti peut déduire la TVA sur les dépenses liées à l’acquisition si elles font partie de ses frais généraux et sont des éléments constitutifs du prix des biens ou services produits par cet assujetti.
En l’espèce, la société V, propriétaire d’un immeuble à usage de bureaux et de commerces qui étaient loués, le cède à une SCPI, en dispense de TVA en vertu du régime de l’article 257 bis du CGI.
La société V ayant supporté les frais afférant à la cession en a déduit la TVA.
A l’occasion d’un contrôle fiscal, l’administration a refusé cette déduction de TVA et rectifié la base imposable. Le Tribunal administratif de Paris a été saisi par la société, qui demande que le crédit de TVA soit rétabli.
En vertu des fondements évoqués précédemment, le TA rappelle que dans le cas d’une société assujettie à la TVA qui exerce une activité économique et envisage la transmission d’une universalité, si cette société réalise des dépenses en vue de cette cession, elle peut déduire la TVA sur ces frais (à condition d’en produire les justificatifs).
En effet, ces frais sont réputés faire partie des frais généraux de la société et se rattacher aux éléments constitutifs du prix des opérations relevant de son activité économique.
Dans cette affaire, pour contester la déduction de TVA sur les dépenses préparatoires à la cession de l’immeuble par la société V, l’administration s’est fondée sur le fait que l’opération de cession revêtait un caractère patrimonial, dès lors que le produit de cette cession, d’un montant de 51 513 000 €, a été totalement distribué et que la société a ensuite cessé toute activité.
Le juge administratif n’a pas le même raisonnement. Selon lui, invoquer le caractère patrimonial de l’opération ne suffit pas à écarter le lien entre la cession du bien immobilier et l’activité générale de la société. En effet, le principe de neutralité issu du droit européen sur la TVA, interdit selon le tribunal, d’opérer une « distinction arbitraire » entre les dépenses effectuées pour lancer l’exploitation de la société, puis celles effectuées au cours de l’exploitation, et enfin, celles relatives à la cessation de l’exploitation.
Par conséquent, sans distinction aucune, les frais exposés par la société V dans le cadre de la vente de son immeuble sont des frais généraux ouvrant droit à déduction de la TVA.