Les formations
Accédez au catalogue de nos formations en présentiel et distanciel
Visiter le site
Revue | Juin 2023

Droit au renouvellement du bail

245015
En bref : Le droit au renouvellement du bail doit être subordonné au seul respect des exigences prévus à l’article L. 411-59 du CRPM.

Le fait pour les parties d’avoir cessé de donner un caractère onéreux à la mise à disposition d’un hangar ne servant qu’à entreposer du matériel non destiné à un usage agricole effectif, prive-t-il le preneur de son droit au renouvellement prévu à l’article L. 411-46 du CRPM ?

En l’espèce, un propriétaire avait autorisé des exploitants agricoles à entreposer du matériel agricole dans un hangar à compter du 14 avril 1990, moyennant au départ une contrepartie onéreuse. Ce bail s’est renouvelé une première fois en 1999, puis une 2ème fois en 2008 et en principe une 3ème fois en avril 2017.

Le preneur étant décédé en 2013, au cours du 2ème renouvellement du bail, la transmission est intervenue automatiquement au profit de son conjoint et de son fils.

Le propriétaire saisit le tribunal d’instance en novembre 2018, soit plus d’un an après le 3ème renouvellement du bail en vue de condamner les exploitants à enlever le matériel agricole entreposé.

Le propriétaire invoque que le bail n’a pas pu se renouveler en 2017, car les parties au bail rural avaient cessé de donner un caractère onéreux à la mise à disposition depuis plus de 3 ans et que, par conséquent, les preneurs occupaient les lieux sans droit ni titre.

Bien qu’ayant eu gain de cause en appel, la Cour de cassation ne pouvait qu’annuler la décision de 2ème instance.

Le motif invoqué en cassation a été le suivant : à moins que le bailleur n’invoque un motif grave et légitime mentionné à l’article L. 411-31 du CRPM (par exemple, le défaut de paiement ou des agissements de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds), le preneur a le droit, au renouvellement du bail, s’il remplit les seules conditions exigées du bénéficiaire du droit de reprise énumérées à l’article L. 411-59 du code précité, à savoir pour mémoire :

- se consacrer à l’exploitation du bien repris pendant au moins 9 ans et posséder le cheptel et le matériel nécessaires ou, à défaut, les moyens de les acquérir,

- occuper lui-même les bâtiments d’habitation du bien repris ou une habitation située à proximité du fonds et en permettant l’exploitation directe,

- être en conformité avec la réglementation des structures (voir notamment Cass. 3ème civ. 1er avril 2021, n° 19-25.078, voir Revue UNECA Décembre 2021).

 

Or, dans la présente affaire, faute pour le bailleur d’avoir invoqué un motif grave ou légitime pouvant justifier le non-renouvellement, la Cour de cassation ne pouvait qu’annuler la décision des juges du second degré. Le bailleur aurait dû chercher à recouvrer les fermages impayés avant de porter l’affaire devant le juge.

Cet arrêt est une belle illustration du caractère d’ordre public des droits consacrés par le statut du fermage. Les règles régissant les rapports entre le preneur et le bailleur doivent être scrupuleusement observées au risque de voir la situation tourner au désavantage de celui qui aurait pu initialement obtenir gain de cause.